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Un son qui s’échappe d’un djembé, une mélodie venant d’un instrument futuriste à faisceau laser, ou tout simplement une touche de piano effleurée par un doigt hésitant… dans les Maisons Perce-Neige, les ateliers musicaux sont très souvent source de joie.
La Fête de la musique nous rappelle à quel point chacun d’entre nous est sensible à un air, une mélodie, une chanson. Si le 21 juin, les Français descendent dans les rues pour jouer, écouter, parfois danser ou simplement frapper des mains, c’est bien parce que la musique est un partage, un langage quasi universel qui rassemble, y compris ceux « qui ne sont pas comme les autres ».
De nombreuses Maisons Perce-Neige organisent des ateliers musicaux ; c’est le cas à l’IME de Montélimar (26) qui vient de s’équiper d’un instrument étonnant : le bao-pao®. Après avoir rencontré son inventeur, Jean Schmutz , Sébastien Morel, directeur de l’IME, a eu envie de proposer cette activité aux 12 enfants et adolescents de son établissement.[…]
Comment décrire le bao-pao® ? Formé de 4 arcs métalliques verticaux, l’instrument est relié à un ordinateur et envoie des faisceaux laser invisibles. Lorsqu’on les coupe en passant une baguette dans le rayon ou en pressant une commande, le bao-pao® émet une note contenue dans une des partitions enregistrées sous forme informatique.
Ainsi, quelle que soit la fragilité du public, personne âgée, en situation de handicap ou autiste, cette simplification extrême du geste instrumental permet de produire un son. « Jean Schmutz a créé le bao-pao® pour rendre la musique accessible à tous, rappelle Sébastien Morel, y compris à ceux qui disposent d’une faible capacité de mouvement. »
À Montélimar, le jeune va produire des sons avec une baguette ou grâce à un contacteur sur lequel il appuie avec son doigt, son pied, son coude, sa tête selon ses possibilités. Éducatrice en charge de l’activité bao-pao®, Nathalie Pascal a matérialisé le rayon laser par un grand élastique, tendu entre les arcs, afin de faciliter l’apprentissage. […]
« Pour l’instant, nous dit-elle, nous nous écoutons, nous testons, mais déjà on voit bien que le bao-pao® crée tout de suite une ambiance conviviale et qu’il génère de la bonne humeur. Même leurs maladresses font rire les enfants. Ils s’amusent beaucoup à bouger la baguette, à produire ou arrêter des notes. »
L’équipe éducative a choisi d’enregistrer sur l’ordinateur plusieurs types de musique : des chansons, comme Petit papa Noël, des morceaux plus rock, mais également des chants d’oiseaux et des cris d’animaux. Dans le processus, l’éducateur écoute d’abord la mélodie avec l’enfant puis l’installe au bao-pao®. En plus de déclencher la musique, l’utilisateur doit aussi s’efforcer de garder le tempo, ce que Jean Schmutz appelle le phrasé musical. « Les enfants se fatiguent assez vite, donc nous prévoyons des séances d’une demi-heure, constate Nathalie Pascal. Mais leur réaction est immédiate : la surprise lorsqu’ils entendent le son, puis le contentement. »
Les jeunes de l’IME de Montélimar se rendent aussi au conservatoire de la ville le mardi matin. Tous assistent à ces ateliers musicaux par rotation de 3 participants, pas plus. Les éducatrices en charge de l’accompagnement des enfants remarquent que ces séances sont très appréciées. «Une fois là-bas, nous les sortons de leur fauteuil et nous les installons sur une chaise. Le professeur de musique commence un morceau à la guitare ou chante, puis ils jouent en tapant sur un djembé, un xylophone ou en manipulant des percussions ». […]
Le conservatoire, les résidents de la Maison Perce-Neige du 14e arrondissement de Paris le fréquentent aussi. Cette structure, nouvellement reprise par la Fondation, faisait partie des établissements de l’Aria* et a mutualisé des rencontres musicales avec d’autres structures proches géographiquement. Manon Joseph y est éducatrice spécialisée, elle décrit des séances similaires à celles de Montélimar.
Seul le public change puisqu’il s’agit ici d’adultes avec autisme. « Nous allons au conservatoire chaque semaine et nous y retrouvons des adultes d’autres centres. Nous sommes en moyenne 3 éducateurs pour 7-8 résidents. Nous nous installons dans la salle, tous en cercle, et chacun a un instrument. Certains commencent d’emblée à taper sur le djembé, d’autres attendent notre signal. Souvent nous proposons un enchaînement et soit tout le monde le refait ensemble, soit à tour de rôle. ».
Parfois, les professionnels eux-mêmes musiciens apportent de nouvelles idées ainsi que des dynamiques différentes. « Nous nous organisons pour que chacun puisse s’exprimer. Si c’est trop long, nous utilisons un sablier pour limiter le temps. Mais de toute façon, nous adaptons la durée selon leur fatigue. Les séances vont de 40 minutes à 1 h ½ parfois.»
* Aria : Association pour la rééducation et l’insertion des autistes
Interrompues pendant la crise sanitaire, les séances sont inscrites dans les projets personnels des résidents et sont toujours proposées aux nouveaux arrivants, tout en ménageant leur niveau de stress. Une fois au conservatoire, si un participant manifeste trop d’anxiété, l’un des éducateurs le raccompagne. La proximité des deux structures favorise cette souplesse.
Dans tous les cas, Manon constate que « la musique est un bon moyen pour entrer en communication avec des personnes qui ont parfois une autonomie réduite et s’expriment peu verbalement. Chaque séance nous fournit des indicateurs : l’intensité avec laquelle le résident frappe sur l’instrument, sa résistance dans la durée, la compréhension des consignes orales ou visuelles, sa capacité d’imitation. Tout cela nous permet de mieux les connaitre, c’est très positif.» […]
Extraits du Magazine de juin 2022 de la Fondation Perce-Neige